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Le blogue de Georges Bleuhay le poète de Méry-sur-Ourthe

Un article de Pierre René-Mélon (Ecrivain Wallon)

20 Février 2011 , Rédigé par René G. Thirion Publié dans #Wallonie-France

La "révolution de la frite" ne fut pas une révolution. Juste une guindaille (belgicisme) d'étudiants rigolards.Dans ce pays sans culture du débat, sans épaisseur historique, sans vision d'avenir, toute tentative de bouleversement de l'Etat - c'est-à-dire toute révolution digne de ce nom - ne peut qu'être vouée à la triple malédiction de l'auto-dérision, de l'enfermement festif et du déni de réalité.

 

Pour réussir une révolution, il faut d'abord être révolutionnaire, en un mot vouloir renverser le régime en place et en instaurer un autre. Or, que veulent nos révolutionnaires de pacotille ? Conserver l'Etat, préserver la monarchie et toucher le moins possible aux institutions, quitte à revenir au bon vieux temps de la "circonscription fédérale".

Posons donc le diagnostic : toute révolution est impossible en Belgique pour la simple raison qu'il y manque l'essentiel : les mots pour la dire.

 

Et pourquoi donc le Belge est-il incapable de prononcer les mots libérateurs? Pourquoi nos révolutionnaires de cabaret semblent-ils voués aux actes symboliques et aux festoiements dérisoires ? Et pourquoi, toujours, cette référence incantatoire à un surréalisme en toc ?

 

Parce que le Belge versant sud vit sous un impératif catégorique qui lui interdit d'affronter son prochain sous peine de mort politique ; son prochain? cet étrange Flamand qui veut le quitter dans l'amertume et le reproche. La culture ancestrale de l'évitement du conflit a développé chez le Belge francophone un réflexe d'omertà qui ne cède aujourd'hui que pied à pied sous la formidable pression de la radicalité flamande. La parole qui dit simplement les choses ne s'échappe que par les fissures de la peur.

 

Le Belge étiqueté "magrittien" ne transfigure pas le réel, il le nie, il le fuit, il le vilipende. Pourquoi ? Parce qu'il sait inconsciemment que toute prise direct sur les choses qui fâchent, toute liberté de parole salvatrice envers les Flamands leur sera payée en retour par une poussée de revendications nouvelles (nos compatriotes du nord n'ont pas les mêmes délicatesses pour exprimer leurs volontés).

 

Nos bons Belges sont dépassés parce qu'ils ont été éduqués dans le respect dogmatique et concélébré des "différences qui nous enrichissent" (on cherche encore comment) et des vertus insurpassable du "modèle belge de cohabitation pacifique" (sic). Parce qu'ils ont été élevés dans les éprouvettes du "laboratoire de l'Europe" dans lesquelles le monde entier nous regarde expérimenter les délices du "vivrensemble" (copyright RTL).

 

Bref, puisque toute revendication libératrice pourrait accroître son sentiment de culpabilité et déchaîner les forces adverses, puisque toute parole vraie risquerait d'anticiper la fin du pays (qu'on se représente comme une espèce de fin du monde), puisqu'il faut décidément éviter de "mettre de l'huile sur le feu", le Belge torturé met de l'huile dans... la friteuse ; au lieu de sang frais, il se tache de ketchup.

 

Suivant cette logique du non-dit, on peut prédire que tout bouleversement politique futur sera au préalable enrobé de mayonnaise. Le changement de régime sera paisiblement mastiqué, dégluti et digéré avant que les citoyens aient pu mettre un mot sur la chose qu'ils étaient en train d'avaler. L'exact contraire de la supposée transparence démocratique.

 

La Belgique avance donc vers son destin final à contre-coeur, à reculons, par petits pas, en se tordant le cou pour regarder par-dessus son épaule.

Elle tombera sans doute sur une épluchure de loi ou un croc-en-jambe comptable.

Bêtement. Sans gloire. 

 

Pierre René Mélon

 

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P
J'adore la qualité de votre plume monsieur Pierre René:)))<br /> <br /> (d'un conteur-ermite des routes du Canada qui se prépare à vagabonder la Belgique l'été prochain))))<br /> <br /> www.enracontantpierrot.blogspot.com<br /> www.reveursequitables.com<br /> <br /> sur google<br /> Simon Gauthier, le vagabond céleste<br /> <br /> LÈVE-TOI PÈLERIN<br /> dormir<br /> sous le pont de Gatineau, une nuit froide de neige<br /> même pas de sac de couchage, du noir au beige<br /> <br /> gémir<br /> en p’tit bonhomme, les g’noux dans l’manteau<br /> le nez sous l’gilet, là ou c’est chaud<br /> <br /> grandir<br /> contre le mur de ciment se faire si petit<br /> que son coeur en devient firmament<br /> <br /> s’ennoblir<br /> au point ou l’on devient soi-même<br /> un immense pays entre deux océans<br /> <br /> REFRAIN<br /> <br /> la bonte l’humilité, l’humanité<br /> comme vêtement de vie<br /> <br /> lève-toi pèlerin<br /> même si t’as froid même si t’as faim<br /> <br /> ensemence ton pays d’un rêve<br /> pour les jeunes de demain<br /> <br /> ta guitare à la main<br /> marche marche les chemins<br /> ne triche pas ton rêve en douce<br /> en faisant du pouce<br /> <br /> quand un jeune t’embarque<br /> écoute le jusqu’au matin<br /> parce que son rêve à lui commence<br /> là où finit le tien<br /> <br /> TURLUTTE<br /> <br /> COUPLET 2<br /> <br /> manger<br /> quand on t’a ramassé pour t’emmener souper<br /> dans l’espoir d’une belle soirée<br /> par ta guitare endimanchée<br /> <br /> s’laver<br /> la route c’est accepter<br /> d’ètre sale en dehors<br /> d’ètre propre en dedans<br /> en s’guettant<br /> <br /> s’coucher<br /> avoir honte de ses peurs<br /> quand y a tellement d’êtres humains<br /> qui ont pas l’choix d’avoir peur<br /> <br /> s’éveiller<br /> soudain en pleine nuit<br /> s’enfuir sans faire de bruit<br /> après avoir écrit merci<br /> <br /> COUPLET 3<br /> <br /> vaciller<br /> dans un café internet, recevoir un courriel<br /> d’un ami de jeunesse, qui veut t’immortaliser<br /> d’un geste bien intentionné<br /> <br /> créer<br /> une chanson chaque nuit<br /> parce que la veille ce que t’écris<br /> semble s’être évanoui<br /> <br /> dessiner<br /> entre ta voix et tes lèvres<br /> tous les cris des humains<br /> qui ont choisi d’aimer<br /> même s’ils sont mal aimés<br /> <br /> rêver<br /> qu’après sa mort peut-être<br /> de milliers de jeunes en mal d’être<br /> reprendront ton épopée<br /> vers ce pays oeuvre d’art à créer<br /> <br /> FINALE<br /> la bonté, l’humilité, l’humanité<br /> comme vêtement<br /> d’aimer<br /> <br /> Pierrot<br /> vagabond céleste
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