Celui qui me ressemblait comme un frère

15 Février 2017 , Rédigé par Georges Bleuhay Publié dans #Poésie

Avec des étoiles dans les yeux
Il m’avait tout de suite plu
Pourtant pour moi un inconnu
Qui était jeune et j’étais vieux

Il s’exprimait avec passion
Le verbe haut le geste sûr
Il défendait ses convictions
En parlant de littérature

Il adorait Arthur Rimbaud
Également Léo Ferré
L’anarchie se mêlant aux mots
De leur clameur de révoltés

En parler le transfigurait
Il ressentait leur ivresse
Nul poète ne les égalait
Disait-il avec rudesse

Et je voyais brûler en lui
Ce feu que je connaissais bien
Celui que je perds aujourd’hui
Trop calme dans mes entretiens

Il citait la médiocrité
Que l’on trouve dans les écrits
Inondant notre société
Qui méprise les érudits

En moi montait la nostalgie
Du jeune homme que j’avais été
Avec l’incroyable énergie
Que me donnait ma volonté

Ce fut une grande émotion
Il aurait pu être mon frère
Ce beau parleur ce trublion
La vieillesse est une misère

Mais je ne le vis qu’une fois
Accoudé au zinc du comptoir
Celui que je fus autrefois
N’était que l’ombre du miroir

Georges Bleuhay - Le coeur à vau-l'eau - Edilivre Paris 2015