Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blogue de Georges Bleuhay le poète de Méry-sur-Ourthe

Entretien du 21 septembre 2014

21 Septembre 2014 , Rédigé par René G. Thirion

Monsieur X
Monsieur Bleuhay, en ce premier jour d’automne, je pense à votre poème « Le vingt et un septembre » et j’aimerais que nous en discutions. Il est empli à la fois d’espoir, mais aussi de résignation. Vous dites « Tu vois je sais que tu m’attends, un nouvel amour va naître », mais terminez par « Et lorsque le gel figera les ultimes fleurs du jardin serein, je partirai là-bas avec des souvenirs divins ! » Pouvez-vous m’expliquer cette dualité apparente de sentiments contradictoires ?

Georges Bleuhay
Pour comprendre cela, il faut savoir que ce poème fut écrit quelque temps après la disparition de ma femme. Privé de la merveilleuse lumière dont elle avait éclairé ma vie, les premiers mois de ma survie furent épouvantables. Je restais inerte, insensible à tout ce qui m’entourait, avec le dégoût d’une vie sans attrait, sans but, sans passion. Mais début septembre, les derniers jours de l’été et l’approche rapide de l’automne, firent apparaître en moi l’évidente vérité que l’existence comme la nature était soumise à des cycles allant de l’éveil du plaisir, passant par la maturité du bonheur existant et le moment douloureux de la connaissance d’une fin inéluctable.

Monsieur X
Je comprends votre état d’esprit, mais comment expliquez-vous le rebond vers une attente d’un nouvel amour, oserais-je dire, d’un renouveau ?

G.B.
Le mot renouveau ne convient absolument pas, car il donne l’idée d’un certain refus du passé pour le remplacer par un nouvel avenir. Je reprendrais plutôt l’idée des cycles. Ils se suivent, mais sont de toute façon différents. L’année nouvelle ne remplace pas l’année précédente qui aurait comporté un été magnifique et inoubliable, mais il y a l’attente irréfléchie d’y retrouver une saison estivale différente, mais agréable à vivre. Cela fut le cas quand je retrouvai un désir de connaître probablement une dernière fois cette soif inextinguible d’absolu et de passion.

Monsieur X
Monsieur Bleuhay, auriez-vous peur de la mort ?

G.B.
Oui je le crois, j’ai et je crois que j’ai toujours eu en moi cette peur de ne plus vivre. C’est ce qui explique sûrement que j’ai, selon l’expression populaire, « brûlé la chandelle par les deux bouts ». Au cours de ma carrière professionnelle, j’ai rencontré beaucoup de morts-vivants, des gens aux appétits médiocres, aux emballements refreinés, aux passions inexistantes. Je ne voulais pas et je ne pouvais pas être comme eux. J’ai toujours été épicurien et passionné par tout ce que j’accomplissais et si je fus fidèle à ma femme, cela fut probablement par le besoin instinctif de pousser notre relation à son maximum d’intensité. Cela j’en ai pris conscience au moment où elle luttait contre ce terrible crabe qui consomme la chair petit à petit jusqu’à la fin. Je crois que c’est dans ces moments que je l’ai aimée encore plus.

Monsieur X
Mais dans cas, comment pouvez-vous espérer un nouvel amour qui pourrait vous rendre cette folie dévorante qu’est l’amour ?

G.B.
Je vous répondrai simplement par une autre question. Pensez-vous que l’archet d’un violon soit incapable d’en faire vibrer un autre ? Avec d’autres vibrations certainement et des sonorités différentes, mais toujours en harmonie avec une musicienne qui lui impose ses vibratos et cette musicienne c’est la vie simplement !

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article